En ces jours où nos circulations et nos sorties sont
réglementée et où l’infraction à la règle est verbalisée, l’évangile
aujourd’hui nous présente le Christ comme le passage obligé pour aller du
dehors au dedans et du dedans au dehors. Passage obligé, il est aussi passage
autorisé. Il a en effet toute légitimité à prétendre être « la porte ». C’est
lui l’Envoyé du Père, le Messie de Dieu. C’est lui qui a été choisi par le Père
pour être ce passage. Et non seulement Il est « passage », mais Il a vécu le
plus grand passage qui soit celui de la Pâque, passage de la mort à la vie en
son propre corps en sa Résurrection. « Celui qui entre dans la bergerie sans passer
par la porte, mais qui escalade par un autre endroit, celui-là est un voleur et
un bandit ». Qui prétend guider le troupeau sans passer par le portier est
simplement un voleur qui enrôle les brebis à son profit et fait leur ruine.
Mais il est aussi la contre-figure de Jésus. Lui qui, au début de sa mission,
passe par le Père, ne voulant que ce que veut le Père, n’ayant souci que de la
gloire du Père, s’en remettant au Père pour traverser le ravin de la mort.
Soumission d’amour, grâce à quoi les brebis reçoivent de lui subsistance et
liberté. Mais parce que cette soumission est une communion parfaite avec le
Père, portier de la bergerie, voilà que Jésus lui-même doit être reconnu comme
la porte ! Passer par Lui, c’est passer par le Père. La parabole du Pasteur
nous ouvre alors à la relation du Père et du Fils.
La parable trouve un lieu : la bergerie. C’est là une image
familière pour l’Ancien Testament : elle est identifiée à la maison de Dieu qui
accueille le troupeau, maintes fois image, quant à lui, dans la Bible, du
peuple de Dieu. Au temps de Jésus, la bergerie est un enclos délimité par un
muret et placé sous la vigilance d’un gardien. C’est là qu’habituellement le
troupeau passe la nuit à l’abri. Cette idée de refuge et de rassemblement font
de cette bergerie une belle image de l’Eglise. En son sein, nous sommes réunis
dans la confession de la même foi et dans le même amour ; nous y trouvons un
refuge dans le Seigneur. Devenus enfants du Père à notre baptême, nous trouvons
place en son amour ; et cet amour-là rien ne pourra nous l’enlever, aucune
souffrance, aucun malheur, aucune méchanceté. Bien souvent, nous n’en sommes
pas assez conscients. Parce que nous sommes à ce point obnubilés par nos
problèmes, parce que nous ployons sous le fardeau qu’ils constituent, nous ne
nous trouvons plus en situation de nous rendre à l’évidence que, malgré tout
cela, l’amour de Dieu demeure et que, quelles que soient nos fautes, il ne nous
est pas retiré. L’Eglise n’est pas d’abord le lieu où sévissent des empêcheurs
de tourner -en-rond ou des docteurs d’une morale aseptisée : elle est, et doit
être, le lieu où Dieu prend soin de ses enfants. C’est ce qui donne sens
d’ailleurs à tout ministère pastoral.
La bergerie n’est alors pas un milieu clos, hermétique. Il
en est de même pour l’Eglise : sa vocation est de s’ouvrir pour marcher à la
suite du bon Pasteur sur les chemins de la vie. C’est à une expérience pascale
que nous sommes conviés avec le Ressuscité.
« Devant moi, tu as ouvert un passage », dit à Dieu le psalmiste au
psaume 30. La Seigneur a ménagé pour nous une porte : c’est le Christ.
Avez-vous remarqué, en effet, que la porte dont parle Jésus s’ouvre pour faire
sortir les brebis et non, comme on le croit trop souvent, pour les faire
entrer. « Ses brebis à lui, il les appelle chacune par son nom, et il les fait
sortir ». Faire sortir, c’est bien le plus urgent. Nous faire sortir de nos
confinements, certes et certains sont empressés, mais plus encore de nos
enfermements et de nos bercails étriqués ! Faire sortir, c’est le verbe
biblique du Salut. Le Seigneur fait sortir la création du néant, Noé de
l’Arche, son peuple d’Egypte, Jonas de la baleine, Jésus du tombeau… « Tu nous
as fait sortir vers l’abondance », s’écrie encore le croyant au psaume 65. Tant
de gens voudraient « s’en sortir », comme on dit, notamment en ces jours
teintés d’angoisse au plan des réalités socio-économiques.
« Si quelqu’un entre en passant par moi, il sera sauvé ; il
pourra aller et venir, et il trouvera un pâturage ». Chers amis, ne doutez pas
que le Christ-Pasteur prononce un par un nos noms. l nous connaît et nous
appelle. Suivons-le dans la confiance !
AMEN.
Michel STEINMETZ †
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