La semaine passée, nous entendions Jean-Baptiste nous interpeller avec
vigueur : « Convertissez-vous, car le royaume des Cieux est tout proche. »
Aux pharisiens et saducéens qui venaient là en curieux, il disait : « «
Engeance de vipères Qui vous a appris à fuir la colère qui vient ? Produisez
donc un fruit digne de la conversion. » Et, si vous vous souvenez bien, je
vous invitais aussi à la conversion, à ne pas passer à côté de cette occasion
unique d’aller au Seigneur pour lui préparer la route. Je vous disais que la
conversion est un retournement : il nous faut donc demander au Seigneur qu’il
nous aide à nous retourner comme des crêpes ! Et aujourd’hui, nous sommes
un peu plus loin dans l’évangile. Jésus a déjà bien entamé son ministère public
et Jean-Baptiste, lui, croupit en prison. Mais là, de son cachot, il se tient
informé de ce qui se passe au dehors. Et il constate que la conversion porte
des fruits. Il n’a pas prêché pour rien. Le temps de Dieu est là, tout proche.
A quoi le reconnaît-on ?
On reconnaît le temps de Dieu à tous les retournements qu’il produit. C’est-à-dire
à des choses insensées qui se manifestent et qu’à vrai dire on n’aurait pas imaginé
possible. Isaïe les annonçait comme motifs d’espérance : « Alors se
dessilleront les yeux des aveugles, et s’ouvriront les oreilles des sourds.
Alors le boiteux bondira comme un cerf, et la bouche du muet criera de joie ».
Et aux envoyés de Jean – ses indicateurs, Jésus répond : « « Allez
annoncer à Jean ce que vous entendez et voyez : Les aveugles retrouvent la vue
et les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, et les sourds entendent, les
morts ressuscitent, et les pauvres reçoivent la Bonne Nouvelle. ». Ce qui
était annoncé s’accomplit. Jésus le réalise. Et tout le monde peut le
constater. Non seulement l’effort de conversion a hâté le moment favorable du
salut, mais le Royaume produit lui-même des retournements en cascade.
Pourtant devant les signes qui nous sont donnés, il faut garder la
patience. Car, très vite, nous pourrions céder à l’impatience. Soit par
euphorie, soit par facilité. Euphorie de croire que tout est joué et facilité
de renoncer à une conversion qui, de fait, ne serait plus nécessaire. La patience
de Dieu produirait-elle l’impatience ? Dieu, lui, ne cesse de patienter
pour nous laisser le temps de nous préparer à l’accueillir, de porter les
fruits dont parlait le Baptiste. Il est comme le cultivateur qui « attend
les fruits précieux de la terre avec patience, jusqu’à ce qu’il ait fait la
récolte précoce et la récolte tardive. » Il aurait bien des raisons de s’impatienter
envers nous qui traînons les pieds à aller vers lui ! Et le comble serait que
nous soyons impatients, tels des enfants gâtés qui trépignent des pieds dans l’attente
des cadeaux d’un Noël qui n’en finit pas de venir.
Notre impatience serait dangereuse car elle pourrait nous entraîner à
la résignation, tout d’abord : nous deviendrions des gens blasés,
incapables de nous émerveiller encore. Et donc nous ne serions plus en capacité
de voir les signes que Dieu met devant nos yeux, ceux d’un Royaume qui vient, quand
le pardon est rendu possible, quand des personnes seules sortent de leur
isolement, quand on donne à manger à ceux qui n’ont rien, etc… L’impatience
pourrait ensuite engendrer lassitude et fatigue : elle viendrait à entamer
notre endurance. Nous sombrerions alors dans une sorte de spleen spirituel : à quoi bon ? Nous voyons certes des
signes, mais les signes ne font pas le Royaume. Alors comme par dissolution,
nous perdrions notre vertébration en
devenant des mollusques de la foi.
Nous n’allons donc rien céder ! Nous demeurerons dans cet état de
veille qui, plus que lassitude et résignation, fait jaillir en nous le désir de
Dieu. C’est lui qui nous poussera à l’action
ainsi qu’Isaïe nous le demande : « fortifiez les mains défaillantes,
affermissez les genoux qui fléchissent, dites aux gens qui s’affolent
:"prenez courage, ne craignez pas. Voici votre Dieu…" ».
AMEN.
Michel Steinmetz †
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire