« Il ne jugera pas sur l’apparence ; il ne
se prononcera pas sur des rumeurs. Il jugera les petits avec justice ; avec
droiture, il se prononcera en faveur des humbles du pays. » (Is 11, 3-4)
Qui ne rêve pas de cela ? Car nous savons
le poids de la dictature des jugements faciles, des médisances, du travail de sape.
Nous pouvons en être les victimes, y compris au sein de nos communautés chrétiennes.
Les enfants et les jeunes peuvent être les proies du harcèlement dans leur
école ou leur collège. Il est bon alors d’entendre ces paroles. Une petite voix
cependant nous susurre avec malice à l’oreille : « arrête de rêver !
Ce n’est pas demain la veille ! ». Alors que faire ? Y croire ?
Ne pas y croire ? Les choses sont un peu plus complexes qu’il n’y paraît.
Comment est-ce donc possible ? À moins
qu’on ne rêve d’un messie qui viendrait magiquement transformer le monde, sans
que l’on n’y fasse rien, comme des disciples de Jésus ont pu rêver un moment
qu’il allait arranger les choses, sans eux, malgré eux.
Et voici que la lecture du prophète Isaïe nous
donne une indication qui doit orienter autrement notre réflexion. « Il n’y aura
plus de mal ni de corruption sur toute ma montagne sainte ; car la connaissance
du Seigneur remplira le pays comme les eaux recouvrent le fond de la mer…» (Is
11,9-10). Nous découvrons que ce nouveau monde de justice et de paix coïncide
avec un pays rempli de la connaissance du Seigneur. Nous sommes loin d’être une
humanité remplie de la connaissance du Seigneur. Nous avons besoin de faire
encore beaucoup de chemin, sinon pour être rempli de la connaissance du
Seigneur, au moins pour en avoir une part suffisante pour éclairer notre vie.
C’est ainsi que nous pouvons comprendre l’appel
de Jean-Baptiste : « Convertissez-vous car le royaume de Dieu est tout
proche ». La conversion, c’est précisément soumettre et changer notre manière
d’agir en fonction de la lumière venue dans notre monde. Et le royaume, c’est
celui établi par la résurrection de Jésus, mais dont la réalisation concrète
n’est pas achevée. Elle n’est pas achevée, non pas parce que Dieu aurait été
empêché et qu’il aurait déjà usé ses forces ! Si l’accomplissement du royaume
des Cieux n’est pas achevé en ce monde au moment où nous parlons, c’est précisément
parce que nos cœurs ne sont pas encore disposés à accueillir le royaume, parce
que, de par le monde, des multitudes d’hommes et de femmes ne participent pas
encore à la connaissance du Seigneur. Devant chacune et chacun d’entre nous se
pose la question décisive pour sa liberté : comment est-ce que je veux vivre ?
Est-ce que je veux vivre selon la parole que Dieu me donne ou est-ce que je
veux vivre en l’ignorant ?
Cette conversion concerne tous les domaines de
notre vie. Elle concerne nos pensées, nos rêves, nos illusions, nos relations
avec ceux qui sont les plus proches de nous, famille, amis… Elle concerne notre
manière d’engager nos forces pour la transformation du monde, soit par notre
travail, soit par la part que nous prenons à l’organisation de la société… Mais
ce monde nouveau de justice et de paix attend que nous ayons préparé les
chemins du Seigneur. C’est pourquoi nous devons entendre cette parole de
l’épître de saint Paul aux Romains : « ce
qui a été écrit à l’avance l’a été pour nous instruire afin que grâce à la
persévérance et au réconfort de l’Écriture nous ayons l’espérance » (Rm
15,4). Grâce à la persévérance et au réconfort des Écritures, c’est-à-dire
grâce à notre détermination, à notre fidélité dans l’accueil de la parole de
Dieu, à notre recherche quotidienne pour la méditer, aux décisions que nous
sommes amenés à prendre pour la mettre en pratique, nous pourrons hâter le
temps béni du royaume.
Oui, aujourd’hui, le Royaume des Cieux s’est
fait proche, aujourd’hui la violence et l’injustice peuvent être éradiquées si
nos cœurs fortifiés par la parole de Dieu persévèrent dans la volonté de faire
ce que Dieu attend de nous.
AMEN.
Michel Steinmetz †
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