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vendredi 14 septembre 2018

Homélie du 24ème dimanche du Temps ordinaire (B) - 16 octobre 2018

Homélie prononcée à l'occasion de la messe d'action de grâce célébrée à l'issue du ministère curial
 
 
Au long des dimanches que nous venons de vivre en méditant sur l’évangile de saint Marc, nous avons vu comment se formulait une question sur l’identité de Jésus, à partir de l’enseignement qu’il donnait avec autorité, à partir des signes de puissance, des miracles qu’il a accomplis. Tous disaient : mais qui est-il celui-là ? Qui est cet homme ? Mais à mesure que l’enseignement de Jésus se développait et que ces signes étaient plus diversifiés, plus expressifs, peu à peu l’idée se développait qu’il n’était peut-être pas simplement le fils de Marie, le charpentier de Nazareth, mais qu’il y avait chez lui quelque chose de plus profond, de plus fort, de plus mystérieux. Un peu comme si une couche de vernis – un vernis de banalité humaine, disons-le – se craquelait pour laisser apparaître en-dessous la réalité même et que la divinité de Jésus transparaissait ainsi. A l’image d’une toile de maître recouverte par les enduits des restaurations hasardeuses de peintres sans génie.

 
Par conséquent, la question que Jésus pose aux disciples est une façon de rassembler ce qu’ils entendent quand ils circulent avec lui. Que dit-on de lui ? La question de Jésus : « Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? » (Mc  8,29) constitue déjà une sorte de tournant, dans le sens où les avis, les opinions que les disciples rapportent de ce qu’ils ont entendu au sujet de Jésus, manifestent d’une certaine façon la rumeur publique. C’est son image qui est ainsi décrite, l’image qu’il a parmi le peuple d’Israël. Mais la question que pose Jésus est aussi une question qui va les toucher très personnellement. Il ne s’agit plus simplement de dire : qu’est-ce que l’on dit de moi autour de vous ? Mais, vous, qu’est-ce que vous dites ? Nous, chrétiens, disciples de Jésus, que disons-nous de lui. Qu’exprimons-nous à son sujet ? Est-ce que nous ne disons rien de plus que ce que tout le monde dit autour de nous ? Ou bien entretenons-nous avec lui une relation qui nous permet d’aller plus loin ?
 
En tout cas, la question directement posée aux disciples qui remet en cause leur propre relation avec Jésus. Qu’est-ce qu’ils veulent faire avec lui ? Mais apparaît aussitôt le basculement auquel Jésus va les contraindre, car s’il accepte ce titre de Christ et de Messie, il commence à dire ce que cela représente. La profession de foi de Pierre serait un peu la conclusion heureuse du chemin positif parcouru par Jésus. Ce serait une manière de dire que tout s’est bien passé et qu’on le reconnaît comme un envoyé de Dieu. Aujourd’hui, après neuf ans parmi vous, vous me ferez peut-être le crédit de dire que, finalement, vous avez survécu à un pasteur comme moi et que les choses ne sont pas finalement si mal passées que cela. Et nous pourrions en rester comme une happy end. Mais voilà que Jésus rebondit et ajoute : « Le Fils de l’homme doit souffrir beaucoup, … être tué avant de ressusciter » (Mc  8,31). Ici, le basculement ne se situe plus simplement dans la relation entre les disciples et Jésus, mais sur le contenu même de leur foi. Il en est de même pour vous ce soir. Qu’est-ce que cela signifie de dire que Jésus est le Christ ? Est-ce qu’il sera le Messie glorieux qui rétablira le royaume d’Israël dans son ancienne puissance ? Ou bien, comme Jésus l’annonce ici, et comme le prophète Isaïe l’avait annoncé, il sera le Messie souffrant, humilié et crucifié. Nous voyons tout de suite comment ce basculement rencontre de plein fouet la représentation que se font les disciples : « Pierre le prend à part et lui fait de vifs reproches » (Mc  8,32). Cela veut dire qu’à partir de maintenant, les événements, les enseignements, les signes que Jésus va opérer, ne vont plus contribuer à enrichir son image de maître, mais initier peu à peu les spectateurs et les auditeurs à comprendre quel est le chemin du salut.
 
Si les disciples résistent, nous comprenons bien que c’est parce que leur rêve d’un messie triomphant disparaît, mais plus profondément peut-être encore, parce que ce chemin que Jésus dévoile devant eux n’est pas simplement l’histoire de Jésus de Nazareth. C’est le chemin dans lequel il les invite à le suivre : « Si quelqu’un veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive » (Mc  8,34). Par conséquent, la résistance des disciples ne s’exprime pas seulement en disant : nous ne voulons pas que le Christ soit un messie crucifié, mais se traduit ainsi : nous ne voulons pas que les disciples soient des disciples crucifiés. Nous voulons bien être disciples si cela améliore un peu notre vie, mais non pour finir dans un tribunal et être condamnés à mort. Renversement dans l’image que les disciples se font du Messie et renversement dans la perception de la mission qui sera la leur.
 
Comme le dit l’épître de Jacques avec toute la rigueur de son expression, « la foi s’exprime par les œuvres » (Jc  2,18), l’attachement au Christ s’exprime par le don de sa vie. Ainsi, frères et sœurs, nous sommes remis ensemble devant la décision radicale qui oriente la vie de tout disciple de Jésus : acceptons-nous, est-ce que j’accepte, que le Dieu auquel je crois, manifesté en Jésus de Nazareth, soit un Dieu crucifié ? Est-ce que j’accepte d’être appelé à renoncer à moi-même, à prendre ma croix et à le suivre ? Est-ce que j’accepte de me donner, de renoncer à faire mon nain grincheux, mon Hans èm Schnogueloch, mon mollasson, pour qu’il vive en moi et par moi, pour que son Eglise continue de vivre ici, dans nos villages ?
 
AMEN.
 
Michel Steinmetz   

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