Aujourd’hui encore, des hommes et des femmes
cherchent à donner un sens à leur existence. Ils demeurent en quête, même si
leur recherche est parfois confuse ou sort des sentiers battus. Le cinéma, par
exemple, est souvent un lieu qui émeut, touche, bouleverse, questionne. Il n’y
a qu’à tendre l’oreille à la sortie des salles et saisir quelques bribes de
commentaires. Nous chrétiens, nous avons cette grande capacité à nous lamenter.
Là au contraire, cela doit nous remplir de joie et d’espérance, parce que nous
avons des réponses à apporter à ces grandes questions de l’existence. « Alors
que les Juifs réclament des signes miraculeux, et que les Grecs recherchent une
sagesse, nous, nous proclamons un Messie crucifié, sandale pour les Juifs,
folie pour les nations païennes » (1 Co 1, 22).
Le passage de l’évangile de saint Jean que
nous venons d’entendre se situe au début du ministère public de Jésus, juste
après l’épisode des noces de Cana en Galilée. À Cana, « Jésus a manifesté sa
gloire et ses disciples ont cru en lui » (Jn 2, 12). Sans transition,
l’évangile nous transporte de la Galilée à Jérusalem, au Temple, pour la fête
de la Pâque. Le Temple de Jérusalem était le lieu le plus sacré, le lieu saint
de tout le judaïsme, le lieu de la présence de Dieu au milieu de son Peuple.
Jésus va y poser un acte, qui ne peut être perçu que comme une critique par les
prêtres et tout le personnel du Temple. La question n’est pas de savoir s’il y
avait trop de marchands. De toute manière, il fallait des marchands pour vendre
les animaux nécessaires aux sacrifices, et des changeurs pour que l’offrande
des fidèles soit acquittée en monnaie juive. En posant ce geste, et en le faisant
de manière violente, Jésus s’en prend en fait aux autorités du Temple, aux prêtres,
qui se remplissant les poches en faisant ce lieu une maison de commerce et de
trafic. Ils dépassent ce qui est nécessaire et utile à l’activité du Temple et
pratiquent un taux de change à leur propre intérêt. Ainsi, ils apparaissent
comme étant à leur propre compte. Ils ne sont plus au service, mais ils se
servent (dans tous les sens du terme). Ils ne sont plus chez Dieu, mais chez
eux. C’est cela que Jésus rappelle avec rage.
Devant le geste de Jésus, que l’évangéliste
nous présente comme provocateur, la question qui lui est posée est de savoir
par quelle autorité il agit ainsi. Jésus répond à cette question par une petite
parabole sur la destruction du Temple : « Détruisez ce sanctuaire et en trois
jours je le relèverai » (Jn 2, 19). Puisqu’il est lui-même, aujourd’hui, la
présence de Dieu au milieu de son peuple, lorsqu’il parle de la destruction et
du relèvement du Temple, il parle de son Corps et prophétise sa mort et sa
résurrection. C’est bien ainsi que l’évangile interprète les paroles de Jésus à
la lumière de l’évènement pascal. Le signe des noces de Cana avait conduit les
disciples à croire en Jésus. De même, l’évangéliste conclut cet épisode au
Temple de Jérusalem en écrivant que « beaucoup crurent en Lui à la
vue des signes qu’il accomplissait » (Jn 2, 23). Ainsi se dessine peu à peu
l’adhésion à la personne de Jésus, à cause de son enseignement et des signes
qu’il accomplit. Devant cela, certains des disciples ont peut-être nourri
l’illusion que tout le peuple allait suivre Jésus. « Mais, nous dit l’évangile,
Jésus n’avait pas confiance en eux, parce qu’il les connaissait tous, il
connaissait par lui-même ce qu’il y a dans l’homme » (Jn 2, 24-25). Cette
réflexion pourrait sembler manifester une défiance foncière et irrémédiable de
Jésus vis-à-vis des hommes. Il me semble qu’elle ouvre plutôt l’espace d’une
progression. Celui qui veut suivre Jésus doit croire en Lui, c’est-à-dire lui
faire confiance.
Ainsi en est-il pour nous qui recevons cette
Parole aujourd’hui. Nous aussi, nous croyons en Jésus à cause des signes qu’il
a accomplis. Et pourtant, notre foi n’est pas parfaite. Elle n’a pas encore
intégré toutes les dimensions de notre existence et toutes les capacités de nos
moyens dans la suite du Christ. Notre foi n’est jamais complètement achevée ou
accomplie. Elle est une réalité vivante et appelée à grandir, à se purifier, à
unifier peu à peu toutes nos capacités. Croire en Jésus, c’est s’engager dans
un chemin où peu à peu il va façonner notre vie et redresser ce qu’il y a en
nous de tordu, de mal orienté, d’impur, d’égoïste.
AMEN.
Michel Steinmetz
†
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire