Au centre de cette
célébration, qui commençait de manière si festive et pourtant si paradoxale, il
y a la parole que nous avons entendue dans l’hymne de la Lettre aux Philippiens
: « Il s’est abaissé » (2, 8). L’abaissement de Jésus. Cette parole nous révèle
le style de Dieu et, en conséquence, ce que doit être celui du chrétien :
l’humilité. S’abaisser est avant tout le style de Dieu : Dieu s’abaisse pour
marcher avec son peuple, pour supporter ses infidélités.
Nous avons marché
tout à l’heure à la suite de la croix. Tout au long du Carême déjà, nous avons
cheminé en acceptant, autant que nous en avons été capables, de renoncer un peu
à nous-mêmes pour que Dieu ait plus de place. Cette marche ne se termine pas aux
portes de Jérusalem ; elle se poursuit dans les jours à venir. Ceux qui
ont suivi le Christ sur les chemins de Palestine ont peu à peu reconnu à ses
paroles et aux signes qu’il a accomplis que cet homme venait de Dieu. Pour
Pierre, Jacques et Jean, cela est devenu plus lumineux encore au sommet de la
montagne à la Transfiguration. Aujourd’hui dans le chemin qu’il emprunte, les
croyants juifs ne s’y trompent pas : c’est le chemin qui de Béthanie à
Jérusalem, en passant par la vallée du Cédron, est décrit par le prophète
Zacharie comme celui du Messie au jour de Dieu. Cette Semaine, la Semaine
Sainte, qui nous conduit à Pâques, nous poursuivrons ce chemin de l’abaissement
de Jésus, qui sera aussi la révélation de sa puissance divine. Et ce n’est qu’à
ce prix qu’elle sera « sainte » aussi pour nous !
Avant d’atteindre
notre but – passer par la croix pour contempler le tombeau vide comme la
promesse de ce qui nous attend –, nous entendrons le mépris des chefs de son
peuple et leurs tromperies pour le faire tomber. Nous assisterons à la trahison
de Judas, un des Douze, qui le vendra pour trente deniers. Nous verrons le
Seigneur arrêté et emmené comme un malfaiteur ; abandonné des disciples ;
traîné devant le sanhédrin, condamné à mort, battu et outragé. Nous entendrons
que Pierre, le « roc » des disciples, le reniera par trois fois. Nous
entendrons les cris de la foule, incitée par les chefs, qui demande que
Barabbas soit libre, et que lui soit crucifié. Nous le verrons raillé par les
soldats, couvert d’un manteau de pourpre, couronné d’épines. Et puis, le long
de la Via dolorosa et sous la croix, nous entendrons les insultes des gens et
des chefs, qui se moquent de son être de Roi et de Fils de Dieu. C’est le
chemin de Dieu, le chemin de l’humilité. C’est la route de Jésus, il n’y en a pas d’autre. Et
il n’existe pas d’humilité sans humiliation. En parcourant jusqu’au bout cette
route, le Fils de Dieu a assumé la « condition de serviteur » (cf. Ph
2, 7). En effet, humilité veut dire aussi
service, veut dire laisser de la place à Dieu se dépouillant de soi-même, « se vidant », comme
dit l’Écriture (v. 7). Cela – se vider ‑
est l’humiliation la plus grande.
Maintenons, ne
rebroussons pas chemin par crainte ou bien ne bifurquons pas. Car il y a un
autre chemin, contraire au chemin du Christ : la mondanité. Elle nous offre le
chemin de la vanité, de l’orgueil, du succès… C’est l’autre chemin. Le malin
l’a proposé aussi à Jésus, durant les quarante jours dans le désert. Mais Jésus
l’a repoussé sans hésitations. Et avec lui, seulement avec sa grâce, avec son
aide, nous aussi nous pouvons vaincre cette tentation de la vanité, de la
mondanité, non seulement dans les grandes occasions, mais dans les
circonstances ordinaires de la vie.
Pour que cela se
fasse, il faut compter sur l’aide de Jésus et sur sa grâce, n’avoir d’yeux que
pour Lui, nous agripper à sa croix, et nous aider les uns les autres. Durant
cette Semaine maintenant, mettons-nous résolument sur cette route de
l’humilité, avec beaucoup d’amour pour Lui, notre Seigneur et Sauveur. Ce sera
l’amour qui nous guidera et nous donnera la force. Et là où il est, Lui, nous
serons nous aussi (cf. Jn 12, 26).
AMEN.
Michel
Steinmetz †
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire