Nous célébrons en ce
jour la Passion du Seigneur. Célébrer
la Passion du Seigneur, ce n’est pas se faire violence une fois par an
pour aller assister passivement à un spectacle tragique. Ce n’est pas non plus
commémorer la mort d’un ami qui était ‘un type formidable’. Malheureusement, il
y a en a eu beaucoup, et il y a en a encore, de ces hommes qui consentent à
mourir en héros, faisant passer la survie d’autrui devant la leur. L’actualité
nous en donnait tragiquement un exemple ces derniers jours. Beaucoup, si le cas
devait survenir, accepteraient, je crois, de donner leur vie pour un
proche : un parent, un enfant, un frère ou une sœur. Peut-être en
serions-nous. Autre chose est encore d’offrir sa vie librement pour quelqu’un
avec qui nous ne sommes pas liés affectivement. Accepter que cet
« étranger » devienne mon « prochain ». Une fois encore, il
n’est pas nécessaire d’être chrétien pour cela, quand bien même l’évangile nous
enseigne cette voie de l’humilité et du renoncement.
Si nous venons célébrer la Passion de Jésus, ce
n’est pas non plus simplement à la manière dont on va consoler un ami.
De consolateurs, Jésus n’en a presque pas eu et il n’en a pas besoin
aujourd’hui. Ses amis, ses disciples, ses familiers ont déserté. Tout du moins
se sont-il fondus anonymement dans la foule des spectateurs passifs, voire
satisfaits. Pierre lui-même l’a renié en affirmant ne pas être de ceux-là. Au
pied de la croix, il ne reste donc que Marie, la mère qui communie aux
souffrances atroces de son enfant, et Jean, l’ami de toujours, le « petit
jeune » de la bande, sans doute encore heureusement insouciant. Son cœur
parle avant sa raison.
Que faisons-nous donc
en ce jour ? Que nous demande le Seigneur en cet instant ? Ce
qu’il veut, c’est que nous comprenions que ce sont nos souffrances qu’il
portait, nos douleurs dont il était chargé ; ce qu’il veut, c’est que nous
fassions le lien entre sa vie et notre vie. Inutile donc de penser que nous
allons lui en rajouter par nos problèmes : au contraire, notre conversion, c’est de reconnaître que
nous sommes impliqués dans la Passion de Jésus. C’est pour nous que
le Christ a souffert (1P 2,21).
Célébrer la Passion du Seigneur, c’est donc se laisser sauver par Jésus. Quand nous allons venir en procession dans quelques instants pour
vénérer la Croix, ouvrons notre cœur et déposons à ses pieds ce qui nous
empêche d’accueillir son amour. Car Il le porte sur Lui. Et sa Passion ne sera
pas vaine pour nous.
AMEN.
Michel
Steinmetz †
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