Rien ne distinguait
ce couple ordinaire qui traversait l’immense esplanade du temple de Jérusalem
grouillante de monde : Joseph et Marie étaient montés de Galilée afin d’accomplir
deux rites ordonnés par la Loi. D’abord le rite de purification de la mère.
Certes enfanter, loin d’être un péché, est une grande bénédiction mais comme il
y a eu épanchement de sang, un sacrifice doit restituer la pureté rituelle. « Lorsque
s’achève le temps de sa purification (quarante jours), elle amène au prêtre un
agneau et une tourterelle...Si elle n’arrive pas à se procurer un agneau, elle
prend deux tourterelles » (Lévitique 12). Joseph et Marie manquent de
ressources : ils doivent se contenter de l’offrande des pauvres. L’autre rite
est beaucoup plus important : il s’agit de la loi du rachat des premiers-nés.
Dieu étant le créateur de la vie, toute première éclosion de vie lui appartient
; l’homme doit donc lui offrir les prémices de ses récoltes ainsi que les
premiers-nés des animaux ; mais pour les enfants, il est strictement interdit
de les sacrifier : ils sont « consacrés » à Dieu (cf. Ex 13).
Ces rites religieux
paraissent incompréhensibles aujourd’hui dans une société sécularisée où le
lien avec Dieu est distendu sinon nié. Les couples disent « qu’ils font un
enfant », au moment où ils le désirent, commençant à désirer un enfant « formaté »
à leur gré, décidant de le garder ou non. L’enfant ne devient-il pas « un
droit », une propriété ? Pour les Anciens, la vie était sacrée, l’enfant
d’abord un cadeau de Dieu à demander et accueillir avec respect. Symboliquement
on offrait à Dieu un sacrifice pour concrétiser cette conviction : notre fils
est à l’image de Dieu, le Seigneur nous le confie, il le place sous notre
garde. A nous de préserver cette image, de l’élever dans cette foi, de le
rendre conscient de ce privilège, de l’assurer de sa grandeur. A nous, parents,
de ne pas nous croire propriétaires : l’enfant n’est jamais une chose mais un
sujet, un don de Dieu. Joseph et Marie ont obéi aux lois rituelles, mais Luc
parle de « présentation » et non du « rachat » de l’enfant.
Jésus est tout de Dieu et tout de l’homme : Dieu l’a offert à Marie à l’Annonciation.
Il est saint. Et au contraire c’est lui qui, plus tard, servira d’agneau offert
pour racheter les hommes de l’esclavage du péché.
Les rites ont été
effectués selon les règles mais, si le prêtre de service n’a vu en Jésus qu’un
enfant comme les autres, un laïc va reconnaître le Messie attendu. Il s’appelle
Syméon (c’est-à-dire : « l’écoutant ») ; il est juste, c’est-à-dire
appliqué à réaliser les volontés de Dieu, ‘ajusté’ au Dessein de Dieu,) ;
religieux, c’est-à-dire pieux, observant rites et prières). Il attend la
Consolation d’Israël (manière, inspirée d’Isaïe 40, de désigner le salut : c’est
un homme d’espérance) ; et l’Esprit-Saint était sur lui (comme les prophètes,
Syméon est guidé par le Souffle de Dieu, il est inspiré, il reçoit des lumières
d’En Haut). Sans doute a-t-il un certain âge cet homme mais, sous l’inspiration
de l’Esprit, il est comblé : l’espérance que lui ont transmises les Ecritures n’a
pas menti. Oui, enfin, après une si longue attente, le Royaume de Dieu va
survenir, le salut s’effectuer, et ce salut est déjà présent, il le tient dans
ses bras. L’ange Gabriel avait annoncé un roi glorieux : à présent Marie
apprend que Jésus ne s’imposera pas comme une évidence, comme un despote. Le
Messie se présentera à la liberté des hommes, on sera pour ou contre lui : l’option
dévoilera la droiture ou le mal des cœurs.
A l’homme Syméon, Luc
joint une femme : Anne apparaît comme le modèle des pauvres veuves. Le service
de Dieu, dans la prière continuelle et la pénitence, ouvre le cœur à l’Esprit
et permet d’accueillir la venue du Messie. Cette reconnaissance éveille la joie
de partager la Bonne Nouvelle. La femme précède l’homme Syméon dans l’urgence
missionnaire.
Chers amis, je vous
propose d’être ou bien un peu Syméon, ou bien un peu Anne, voire les deux en même
temps ! Syméon : celui qui jamais ne désespère de voir les promesses
de Dieu à l’œuvre ; il tient bon sans défaillir. Anne : celle qui
tient pareillement jusque dans ses vieux jours par le secours de la prière qui
fait de son cœur, non quelque chose de rabougri, mais d’ouvert et de généreux.
AMEN
Michel
Steinmetz †
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