La
parabole des dix vierges qui attendent la venue de l’Époux nous parle du retour
du Christ et tourne notre regard vers notre avenir, qu’il s’agisse de l’avenir
de l’humanité, de l’avenir de notre Église, de l’avenir de notre pays, ou de
l’avenir de chacun et de chacune d’entre nous. Le temps que nous vivons rend
cette projection vers l’avenir plus incertaine et plus aiguë à la fois. Dans
une culture sécuritaire qui nous encourage à préserver toutes les protections
élaborées dans les temps de prospérité, ce qui arrivera demain est souvent
considéré comme une menace. Qu’en sera-t-il de nos retraites, de notre
protection sociale ou même tout simplement de notre mode de vie, qui permet à
la plupart d’entre-nous d’échapper aux menaces vitales de la sous-alimentation
et du manque de soins, qui restent le lot de la majorité de l’humanité ?
Notre
humanité est dans l’attente de la venue du Christ Sauveur. Pour beaucoup cette
attente reste enfouie et voilée derrière un espoir un peu irrationnel de
solutions politiques. Certains pensent encore que la providence est entre les
mains des états de la terre et ils n’attendent « rien de bon de
Nazareth », pour reprendre l’expression de l’Evangile (Jn 1, 46). D’autres
ont oublié l’espérance que leur donnait une foi vivante, et se sont laissé
glisser dans l’indifférence ou le fatalisme. Ils se demandent si l’homme peut
encore faire quelque chose pour changer le monde, pas simplement pour le faire
rêver, mais pour en transformer la réalité. Les débats sur l’écologie en sont
une trace. D’autres encore imaginent la victoire du Christ comme un triomphe
éclatant. Comme les vierges sages, notre Église attend sa manifestation avec
confiance.
Quelle
attitude nous est suggérée par cette parabole ? Quelle est la sagesse qui
nous munit des réserves d’huile nécessaires pour accueillir le Christ quand il
vient ? La conclusion de la parabole nous en donne la clé :
« Veillez donc car vous ne savez ni le jour ni l’heure. » (Mt 25, 13)
Le chrétien est appelé à devenir et à demeurer un veilleur attentif, qui se
tient prêt pour la venue de l’Époux. Il ne s’agit pas seulement de comprendre
que, pour chacun d’entre nous, la rencontre définitive est imprévisible et que
nous pouvons mourir à tout moment. Il s’agit aussi de comprendre que Dieu vient
toujours dans l’histoire des hommes comme à l’improviste. Entre le temps de
l’Incarnation et son retour à la fin des temps, il vient à tout moment dans la
vie de ce monde. Sommes-nous attentifs à percevoir sa présence au cœur de
l’histoire des hommes ? Les événements que nous vivons questionnent notre
foi. Croyons-nous vraiment qu’il est vivant et qu’il reviendra ?
Croyons-nous vraiment qu’il est présent au milieu de nous ? Tant de
chrétiens vivent aujourd’hui comme si le Christ était une histoire ancienne à
laquelle nous n’aurions plus accès ! Jésus serait une sorte de sage
fondateur aux écrits duquel on se réfère, mais qui reste fixé à jamais dans les
profondeurs de l’histoire. Tant de chrétiens n’attendent plus rien de sa venue
ni à la fin des temps ni dans l’aujourd’hui de nos vies !
Nous
croyons que Jésus est vivant aujourd’hui. Nous croyons que chaque fois que nous
nous réunissons en son nom, il est au milieu de nous. Nous croyons qu’il parle
au nom de son Père et que sa Parole est une lumière pour conduire nos
existences. Nous proclamons qu’il est
vivant et présent quand nous répondons à son appel pour nous rassembler pour le
Jour du Seigneur et faire mémoire de sa résurrection dans l’Eucharistie :
Dieu est quelqu’un pour nous. Nous proclamons qu’il est vivant quand nous
laissons la charité nous sortir de notre tranquillité pour nous mettre au
service des plus pauvres de nos semblables ; quand nous allons vers les
prisonniers, les malades, les émigrés, les rejetés de la prospérité.
Dans
les temps que nous traversons et où beaucoup se laissent saisir par la panique
en voyant s’écrouler un univers de sécurité, notre sérénité et notre engagement
au service de tous, c’est aujourd’hui notre manière de nous tenir prêts à
reconnaître l’Époux qui vient.« Veillez donc car vous ne savez ni le jour
ni l’heure. »
AMEN.
Michel
Steinmetz †
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