Aujourd’hui
l’Église célèbre la fête du Christ, roi de l’univers. Quand nous entendons ce
mot de « roi », nous avons tendance à le comprendre à la manière dont
nous apprenons dans les cours d’histoire qu’il y a eu jadis des rois ou à la
manière dont il en existe aujourd’hui et que nous percevons par le truchement
des actualités ou des revues mondaines. Nous comprenons qu’un roi ou une
reine est un chef d’État qui exerce un certain nombre de pouvoirs. Mais ce
n’est pas comme cela que le Christ veut présenter la royauté de Dieu. Ce n’est
pas comme cela qu’il est lui-même Roi de l’univers. Comme nous l’avons entendu
dans le livre d’Ézékiel, le roi que Dieu veut envoyer, c’est un pasteur,
c’est-à-dire un berger qui prend soin du troupeau, qui va chercher les brebis
blessées pour les soigner, les brebis égarées pour les ramener, redonner des
forces à celle qui est faible, bref, c’est un pasteur et un berger qui prend
soin de son peuple.
Le
pasteur, comme nous le dit la parabole de l’évangile, trie les animaux :
les bons d’un côté et les mauvais de l’autre. Comment devient-on une brebis
plutôt qu’une chèvre ? C’est la question que devaient se poser ceux qui
entendaient Jésus parler des brebis qui seraient à sa droite et des chèvres qui
seraient à sa gauche. Qu’est-ce qui permet de faire le partage ? Jésus
nous l’explique : « j’avais faim, vous m’avez donné à manger, j’avais
soif, vous m’avez donné à boire, j’étais un étranger, vous m’avez accueilli,
j’étais malade et vous m’avez visité, j’étais en prison et vous êtes venus
jusqu’à moi » (Mt 25,35-36). Il n’est pas question de Dieu dans tout cela.
Pourquoi ? Parce que ce jugement ne s’adresse pas simplement aux fidèles qui
ont reçu les Dix commandements et la Parole de Dieu pour éclairer leur chemin
et pour conduire leur vie. Ce jugement s’adresse à tous les hommes, qu’ils
soient chrétiens ou non, qu’ils soient croyants ou non. Il s’adresse à une
qualité tout à fait extraordinaire que possède tout homme, la capacité de
savoir ce qui est bien et ce qui est mal. Évidemment, cette capacité peut se
troubler, s’obscurcir. Elle peut se développer. Mais tout le monde sait qu’il y
a des actions bonnes et des actions mauvaises. Tout le monde a la capacité de
faire la différence entre le bien et le mal. Dans la Bible, il y a une image
pour nous l’expliquer. On sait que l’on peut faire la différence entre le bien
et le mal quand on fait la différence entre une pierre et du pain. Un enfant
tout petit ne fait pas forcément la différence entre une pierre et du pain, il
est capable de mordre dans une pierre. Mais arrive un moment où il sait que la
pierre ne se mange pas et que le pain se mange. Il fait la différence entre ce
qui est bon pour lui et ce qui n’est pas bon pour lui. Cette capacité qui nous
habite, que nous l’appelons la conscience. Nous sommes capables de juger ce qui
est bon. On peut se tromper, on peut faire semblant de se tromper, on peut ne
pas faire ce que l’on sait qui serait bien, et faire ce que l’on sait qui est
mal, tout cela c’est possible, mais cela ne fait pas disparaître cette lumière
qui est au cœur de l’homme et qui est le signe de la liberté que Dieu lui a
donnée.
Nos
frères orthodoxes parlent du sacrement du baptême comme de celui de l’ « illumination ».
Notre liturgie, elle-même, dans le temps de Pâques, nous dit que nous sommes
illuminés (non pas « des illuminés ! »). Nous avons reçu une
lumière intérieure qui nous permet de mieux faire fonctionner notre conscience
morale. Ainsi, frères et sœurs baptisés, vous êtes mieux capables de savoir ce
qui est bien et ce qui est mal, et par votre confirmation vous êtes plus forts pour
désirer ce qui est bien et rejeter ce qui est mal. Nous voyons dans la
parabole, ces gens qui ont donné à manger, qui ont visité les malades, qui ont
habillé ceux qui étaient nus, etc. et qui disent : « mais quand
avons-nous fait cela ? » Ils savent bien qu’ils ont rendu service aux
autres, mais ils n’avaient pas conscience qu’ils servaient Dieu en même temps.
Ils avaient compris un chemin de bonté, ils avaient compris la bonté en action,
et en cela, même s’ils n’étaient pas très éclairés sur la foi, ils faisaient
quelque chose de bon aux yeux de Dieu, tellement bon que ce qu’ils faisaient au
plus petit des hommes, c’est à Dieu qu’ils le faisaient.
C’est
cela être disciple de Jésus. C’est cela participer à son Royaume pour qu’il
advienne. Un règne qui ne s’impose par la violence mais par un amour qui s’impose
comme une évidence.
AMEN.
Michel
Steinmetz †
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