« Ils se moquaient de lui », en
entendant cela. C’est ce qui est dit un peu plus loin dans l’évangile de Luc,
en conclusion du passage d’aujourd’hui. Les Pharisiens qui entendaient toutes ces paroles de Jésus
sur l’argent, se moquaient de lui. Car, dit l’évangéliste, « ils étaient
amis de l’argent ».
Jésus parle ici de l’argent comme d’une
personne. Il semble personnifié. Peut-on être amis d’une monnaie ? Assurément,
non. Mais dans ces paroles du Seigneur, quelqu’un semble se cacher derrière. Mammon est le terme qui, dans le Nouveau
Testament, caractérise la richesse matérielle ou l’avarice, en la
personnifiant. Mammon serait un mot d’origine
araméenne, signifiant « riche ». Néanmoins son étymologie est obscure. Certains
le rapprochent de l’hébreu matmon,
signifiant trésor, argent.
« L’argent régit le monde », dit le
proverbe. Notre époque parle volontiers d’une dictature de la finance à
laquelle tous les intérêts seraient soumis, logique financière et économique
implacable prête à tout pour le profit. Pauvres et petits en font les frais, de
plus en plus. Ils deviennent encore plus pauvres et plus petits. Quel était
donc le rapport de Jésus à Mammon ?
A-t-il diabolisé l’argent ? Tout en l’utilisant pour vivre ? Vous
savez tous, pour l’expérimenter chaque jour, que l’argent est nécessaire. Sans
argent, on ne peut vivre.
Souvenons-nous d’abord de la petite phrase qui
invite à un rapport à l’argent juste, correct et responsable : « Si
donc vous n’avez pas été dignes de confiance pour l’argent malhonnête, qui vous
confiera le bien véritable ? » Jésus est persuadé que le caractère d’un
homme se révèle aussi dans son rapport à l’argent : « Celui qui est
digne de confiance dans la moindre chose est digne de confiance aussi dans une
grande. » En disant cela, Jésus met l’argent à sa juste place : Il
fait partie des « petites choses » et ne doit pas recevoir la
première place. Si nous accordons la première place à l’argent, nous en
devenons esclaves, nous sommes au service de l’argent, alors que c’est lui qui
doit nous servir. Nous pouvons très vite en faire une idole, un dieu Mammon qui gouverne tout et remplace notre
Dieu. Cette puissance, insidieusement, dominera alors notre manière d’être et d’agir
et toutes nos relations passeront par le prisme du gain, de l’avarice, de l’avoir.
Peu à peu il n’y aura plus de place en nous pour la gratuité, y compris celle
de la relation avec les autres.
L’argent doit nous servir pour vivre, pour
subvenir à nos besoins, les nôtres et ceux des autres : « Faites-vous
des amis avec l’argent malhonnête ». Jésus nous conseille d’ouvrir un
compte à valeur constante dans « les demeures éternelles » avec l’argent
duquel nous ferons du bien. Notre
linceul n’aura pas de poches. Il y a tellement de bonnes choses qui se
réalisent chaque jour grâce aux dons, aux aides en personne en difficulté, aux
subventions accordées à de bonnes œuvres.
Mais il faut aussi dire un mot de la parabole
choquante de Jésus dans laquelle le Seigneur félicite personnellement un
escroc. Cet homme a fait une gestion calamiteuse de la fortune de son patron. Il
sait qu’il va perdre son emploi, mais il n’imagine pas se salir les mains en
travaillant dur et honnêtement. Au contraire, il poursuit ses malversations et
fait de criminelles réductions de quittance aux débiteurs de son patron. Son
but est de s’assurer un avenir confortable en se faisant de « bons amis »
qui subviendront à ses besoins plus tard quand il aura perdu son travail.
Cette histoire cadre bien avec notre époque,
avec les affaires d’escroquerie qui scandant l’actualité des derniers jours au
gré des procès, quand certains déploient un vrai talent à mettre leur magot à l’abri
de l’administration fiscale, par exemple. Qu’y a-t-il de louable ? Sûrement
pas l’escroquerie mais l’habileté et l’énergie investie à cette fin. Faites-vous
des amis au ciel, conseille Jésus. Vous pourrez bien en avoir besoin un jour. Et
pour cela, il est toujours utile de faire un bon usage de son argent, en ne se
trompant pas d’amis !
AMEN.
Michel Steinmetz †
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire