Dieu est dangereux.
Le voici, là sur la croix, les bras étendus. Il rassemble et attire tout à
lui. Il happe l’humanité. Il ne la
laisse pas tranquille. Sa mort nous provoque. Son Royaume n’est pas de ce
monde, parole sublime et céleste. Son Royaume n’est pas de ce monde, il est
supérieur. Laissez-lui donc son Royaume ! Il sera bien obliger de nous
laisser le nôtre. Il sera descendu de la croix, mis au tombeau. On roulera la
pierre. Les disciples se disperseront. Bientôt l’affaire sera close et ne
parlera plus de cet agitateur. Enfin l’humanité bousculée par ses paroles, ses
enseignements, ses miracles reviendra à sa tranquillité. Assez de mauvaise
conscience.
Nous savons que cela
ne se produira pas. Car aujourd’hui, rien n’est fini, bien au contraire. La
croix est dressée et elle ne cessera d’être pour tous un signe de
contradiction. Celui qui nous enseigne l’amour sans limite de Dieu, sa
miséricorde plus grande que tout notre péché. Elle est le signe devant lequel
nous nous prosternons, parce que, par elle, nous avons la vie. Elle est le
signe que nous ne cessons de tracer sur notre corps en souvenir de ce
jaillissement de grâce. La croix de Jésus nous fait chrétiens.
La tentation, y
compris la nôtre, est bien souvent cependant d’enfermer le bon Dieu ou de le
tenir à bonne distance. Qu’il nous ne provoque pas trop ! Nous
catholiques, nous l’avons volontiers appelé, de manière désuète, le
« prisonnier du tabernacle ». Là tu le tiens fermement en sûreté. Il
est là dans l’obscurité, dans ce coffre. La clé pour l’ouvrir se trouve quelque
part à la sacristie. C’est là que nous le faisons résider, et il devrait
s’estimer heureux si quelques bonnes vieilles passent, en revenant de la
boulangerie, pour lui dire une dizaine de chapelet. Pour cela, me direz-vous,
il faudrait d’abord que l’église soit ouverte… Au dehors, les gens passent, les
voitures fusent. Au mieux jette-on un regard vers la façade de l’église. A-t-on
besoin de Lui ? Chacun mène sa vie sans trop se poser de questions.
Lorsque l’affaire
devient sérieuse, l’homme qui estime n’avoir jamais prisé assez haut sons
propre besoin d’amour, repousse tout net l’offre d’amour. Il s’échappe des bras
qui voudraient e saisir. Au fond de lui-même une voix intime l’avertit : « ne
te laisse pas entraîner ». Le danger est trop grand. Dis-lui que cela te
fait beaucoup de peine, que tu as déjà tout ce qu’il te faut ou que tu te
débrouilles par toi-même, tout seul comme un grand. En disant cela, ton regard
voit, là, la porte du tabernacle ouverte. Il est vide. Dieu se serait-il
échappé ? Il te rappelle simplement qu’Il est toujours là où tu ne
l’attends pas. La croix ne l’a pas arrêtée. Au contraire, elle est devenue son
trône. C’est dans ta faiblesse désormais qu’il agit et qu’il te sauve. Parce
qu’il l’a prend sur lui, la traverse et la ressource de sa vie.
Tu penses te
débrouiller par toi-même. C’es bien. Mais pourquoi balbuties-tu le Notre Père avec ces paroles :
« Délivre-nous du Mal » ? Tu crois donc, au moins un peu, qu’il
pent faire quelque chose pour toi. Ton fardeau est lourd, tes soucis pesants.
Il y a ceux qui tu partages, et tous ceux dont tu n’oses parler. Sur la croix,
regarde, le Fils de Dieu a les bras ouverts. Viens à Lui ! Dieu n’est pas
si dangereux que cela. Il aime, il t’aime. C’est tout. Et cela nous suffit.
AMEN.
Michel
Steinmetz †
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire