" Dieu qui a choisis des pierres vivantes pour bâtir
la demeure éternelle de ta gloire, fais abonder dans ton Eglise les fruits de
l’Esprit que tu lui as donné : que le peuple qui t’appartient ne cesse pas
de progresser pour l’édification de la Jérusalem céleste ».
Tels étaient les mots de notre prière alors que nous
débutions cette eucharistie et voilà donné le sens de la célébration qui entend
nous rassembler aujourd’hui.
La vision d’Ezékiel rend bien compte de la foi d’Israël :
Dieu est et reste présent à son peuple au gré des vicissitudes de l’Histoire,
sa gloire demeure dans la Temple de Jérusalem. Elle est le Seigneur au milieu
de son peuple.
La source jaillissant de dessous le Temple montre que la
présence du Seigneur est source de vie. Elle assainit en même temps qu’elle
fait vivre. En Palestine, en effet, une source était fréquemment considérée
comme un symbole de la puissance vivifiante de Dieu ; on construisait dans
ses parages un sanctuaire. Ainsi en était-il à Jérusalem des fontaines du Gîhon
et de Siloé. Dans la nouvelle Sion, celle d’après l’Exil, Ezékiel voit jaillir
sous son Temple une nouvelle source. Désormais cette source qui jaillit,
grandissante, de la nouvelle cité, s’en va, fertilisant la région la plus
désertique du pays, manifester la puissance porteuse de vie et pleine de
puissance du Seigneur, dont la gloire habite le Temple. Ce tableau d’une eau
abondante et fertilisante reprend l’image du jardin d’Eden, merveilleusement
irrigué, lui aussi, où germait, au milieu d’une luxuriante végétation « l’arbre
de Vie ». « Il est avec nous, le Seigneur Dieu de l’univers,
citadelle pour nous le Dieu de Jacob ! », voilà la foi d’Israël.
L’Evangile nous invite, quant à lui, à contempler Jésus comme
le vrai Temple de Dieu. Désormais, à la lumière seulement de la résurrection au
troisième jour, nous pouvons affirmer que Jésus est bien le lieu où Dieu se
révèle dorénavant.
En chassant les marchands du Temple, en renversant les
comptoirs des changeurs, Jésus manifeste que l’économie interne à ce lieu, dévoyée
par les profits indus de certains, est désormais caduque. L’ « amour de la
maison de son Père » le dévore. Aux yeux des Juifs, l’autorité que
Jésus s’arroge dans les choses du Temple devait être authentifiée par un acte
prodigieux. Jésus, lui, annonce un signe qui se situe à un tout autre plan que
celui auquel se place ses interlocuteurs. Ses propos ne s’éclaireront en fait,
même pour ses propres disciples, qu’après la Résurrection : Jésus est le
lieu où Dieu choisit de faire sa demeure et de se révéler.
Si Dieu est, en Jésus, présent à tout homme, il l’est aussi
de manière pleine, totale et entière à la « sainte Eglise de
pécheurs » qu’ensemble nous formons. Avec le don de l’Esprit, à la
Pentecôte, Jésus remet à la communauté de ses disciples la mission de
l’annoncer par toute la terre. Le Corps du Christ est bien le corps charnel de
Jésus, il est encore le pain consacré de l’Eucharistie, il est aussi l’Eglise,
communauté de fidèles, qui se rassemble pour se nourrir du corps eucharistique
et, ainsi, devenir ce qu’elle a reçu : précisément le Corps du
Christ !
Nous sommes tous appelés à devenir des « pierres
vivantes », quelle que soit la qualité de notre matériau et la beauté
de nos finitions, pierres qui ne cessent de participer à la construction de ce
génial édifice dépassant tous les autres. Car nous bâtissons sur les fondations
de l’Evangile ; nous prenons comme piliers la foi des Apôtres ; nous avons
pour maçonnerie la communion fraternelle qui nous relie les uns aux autres et
qui relie entre elles les Eglises ; au cœur de cet édifice, il y a une clé
de voûte, sans laquelle rien ne pourrait tenir : Jésus-Christ lui-même.
En cette fête de la dédicace de la basilique du Latran, ne
doutons pas que Dieu nous est présent ! N’ayons pas peur de prendre notre
part à ce merveilleux chantier pour
qu’en ce monde, en notre monde, s’édifie le plus bel édifice, celui du Corps du
Christ pour que Dieu soit dit à l’homme d’aujourd’hui, pour que notre humanité
soit transfigurée et rachetée ! Nous sommes le Temple de Dieu !
AMEN.
Michel Steinmetz †
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire