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vendredi 19 octobre 2012

Homélie du 29ème dimanche du temps ordinaire (B) - 21 octobre 2012

Homélie prononcée en la cathédrale Note-Dame de Strasbourg, à l'occasion des 130 ans de l'Union Sainte-Cécile

« Suivant le dire d’un ancien, il faut manger pour vivre, et non pas vivre pour manger. – Ah ! Que cela est bien dit ! Approche, que je t’embrasse pour ce mot. Voilà la plus belle sentence que j’aie entendue de ma vie. Il faut vivre pour manger, et non pas manger pour vivre. Non, ce n’est pas cela. Comment est-ce que tu dis? – Qu’il faut manger pour vivre, et non pas vivre pour manger. ».
Molière, L’Avare, Acte III, scène 1.

Je ne sais si Molière avait les paroles de l’évangile en mémoire en écrivant ce dialogue mythique entre Valère et Harpagon, mais ne serions-nous pas tentés, dans notre monde actuel, de renverser la formule évangélique et d’affirmer pour notre compte : venu pour être servi et non pour servir ?
Or le Christ nous enseigne et nous impose l’inverse : « venu pour servir et non pour être servi ». A l’heure de la quête effrénée du plaisir, du bon temps, des loisirs, le service gratuit et désintéressé ne semble plus faire recette. La crise que connaît le monde associatif, le tissu familial et jusqu’à nos communautés chrétiennes en ait bien l’indicateur. Que de mal avez-vous à trouver des bénévoles qui acceptent encore de donner de leur temps pour une cause ! N’exagérons rien, cependant, il est vrai : il y en a de ces gens et peut-être même en faites-vous partie !

I.- Etre servi ou la demande toute légitime des apôtres Jacques et Jean.

Imaginons la scène. Jacques et Jean, les fils de Zébédée, sont des braves gens. Ils ont trouvé leur maître. Celui-ci parle d’un Royaume qui se met en place. Ils préparent leur avenir. C’est naturel. Jésus, lui, a annoncé à ses disciples, et pour la troisième fois, sa Passion et sa Résurrection maintenant toute proche. Plus les jours passent, plus il sait comment va s’écrire l’histoire. Ses disciples ne comprennent toujours pas. Ils sentent bien que quelque chose se prépare : « ils étaient effrayés et avaient peur », nous rapporte saint Marc. C’est dans cette imminence, dans cette urgence, que Jacques et Jean se décident à interpeller Jésus : « Maître, nous voudrions que tu exauces notre demande ». Et quelle est-elle cette demande : plus qu’un portefeuille ministériel au prochain remaniement, siéger à la droite et à la gauche de Jésus dans son Royaume !
Quoi de plus légitime, de plus normal, de plus compréhensible que de préparer son avenir, et qui plus est lorsque les temps sont troubles, incertains ? N’avons-nous pas connu pareille tentation ? Faire jouer du piston, comme on dit, pour arriver à tel ou tel poste, pour avoir, enfin, un avenir assuré et tranquille, pour avoir, peut-être même, le pouvoir et être servi ? Ne jetons pas trop vite la pierre à Jacques et Jean ! Leur demande est légitime. N’en n’aurions-nous pas fait autant ?

II.- Servir ou le courage de la persévérance.

« Vous ne savez pas ce que vous demandez ! ». Voilà la réponse de Jésus. Il recadre les choses. Siéger à la droite et à la gauche du Fils de l’Homme, ce n’est pas rien ! Le Christ rappelle, si besoin était, que d’accorder cela ne lui revient pas mais relève de l’initiative du Père. Lui-même se reçoit du Père et reçoit de lui son pouvoir.
Boire à la coupe que Jésus s’apprête à boire, recevoir le baptême dans lequel il va être plongé, voilà les conditions sine qua non pour accéder au Royaume. La coupe est souvent, dans l’Ancien Testament, un symbole de la souffrance ; à cette image, Marc ajoute celle du baptême, qui désigne la mort à soi-même pour la renaissance en Dieu. Jésus, en effet, ne vient-il pas d’annoncer pour la troisième fois, sa Passion, alors même que, déterminé, il fait route vers Jérusalem ?
Jacques et Jean réponde à l’interrogation de leur maître de manière on ne peut plus claire : « Nous le pouvons ». Et ils le pourront, en effet : leur vie de foi toute entière vouée à l’annonce de l’Evangile et couronnée par la gloire du martyre n’en est-elle pas l’expression parfaite ? Ils ont persévéré, ils ont tenu fermes. « A cause de ses souffrances [ ou, comme nous le suggère un autre traduction : ayant payé de sa personne], le Serviteur verra la lumière, il sera comblé », nous dit le prophète Isaïe.

III.- Servir nos frères et suivre le Christ ou l’espérance de la gloire.

Isaïe parle de « payer de sa personne ». Peut-être est-il bon de nous rappeler de temps à autre que venir en aide à nos frères, se faire le serviteur de tous demande toujours un effort. Le Christ nous invite, pour le rencontrer, à nous faire solidaires les uns des autres. Il nous exhorte, comme il le faisait pour Jacques et Jean, à boire avec lui la coupe du salut, c’est-à-dire non à courir au devant des souffrances ou de faire de notre volonté de service l’étendard de notre vanité, mais à persévérer dans la foi.
Alors nous comprendrons, au travers, parfois, d’âpres moments de combat et de purification intérieure, que c’est celui qui persévèrera jusqu’à la fin qui sera sauvé. Il y a de plus de joie et de bonheur à donner sa vie pour les autres que de rester renfermer sur sa petite personne. Servir ses frères au nom de sa foi en un Dieu fait homme : voilà qui peut donner du sens à une vie !
Nous ne serons sans doute pas dans la tonalité exacte à laquelle nous convie sans cesse la société, du moins telle que les médias ne cessent de nous la présenter avec son cortège de valeurs futiles et passagères, mais nous vivrons de la joie et de la paix du Christ, des valeurs sûres qui, elles, ne passent pas. Cette gloire-là vaut pour l’éternité !

« Pouvez-vous boire au calice où je vais boire ? » C’est-à-dire : êtes-vous prêts à donner votre vie pour vos frères par-delà toute souffrance ? Voici la question que nous retiendrons avec cette consigne : en attendant la gloire, mettez-vous au service de vos frères ! Voilà la seule manière d’imiter le Christ et de lui ressembler, la seule manière de ne pas se tromper quoi qu’il advienne !

AMEN.

Michel STEINMETZ †

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