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samedi 30 octobre 2010

Homélie du 24ème dimanche du Temps ordinaire (C) - 12 septembre 2010

La tentation du peuple des Hébreux est celle de toute société. Se fabriquer des idoles. Fabriquer un dieu à sa mesure, parce que le Tout-Autre nous paraît si éloigné. Fabriquer de ses mains un dieu qui nous conforte dans nos errances, parce que nous savons la vérité toujours dure à admettre. Fabriquer un dieu qui nous est sympathiquement proche quand le Dieu de la foi semble rester sourd à nos appels de détresse.
Aujourd’hui, comme hier au pied du Sinaï, cette tentation est bien vivante. Elle rejoint d’ailleurs ce que Jésus nous faisait comprendre dimanche dernier : « Celui qui ne me préfère à son père, sa mère, son frère, sa sœur, son conjoint, … celui-là ne peut pas être mon disciple ». Céder aux idoles, c’est bien cela. Préférer le profit, l’ambition professionnelle, le sexe, le jeu ou d’autres plaisirs à un tel point qu’ils deviennent pour nous des maîtres et nous en font leurs sujets. Céder aux idoles, c’est préférer notre asservissement aux forces de la mort plutôt que notre liberté en Dieu. Péguy disait : « Quand on a goûté à l’agenouillement droit des hommes libres, les prosternements d’esclave ne vous disent plus rien ».
Celui qui a fait cette expérience-là, en vérité, n’éprouve ni honte ni déplaisir à reprendre à son compte les paroles du psaume qu’il nous était donné de chanter en ce jour, mieux encore à en imiter l’attitude fondamentale qui est celle du pécheur disant sa foi en l’amour de son Dieu.

I.- « Pitié pour moi, mon Dieu, dans ton amour,
selon ta grande miséricorde, efface mon péché ».

C’est dans cet esprit qu’au début de chaque eucharistie nous nous mettons en présence du Seigneur et que nous lui confions notre pauvreté en reconnaissant notre péché : nous connaissons, en effet, notre vie aussi bien que l’infidélité des Hébreux, « ce peuple à la tête dure ». Sur la parole de Moïse, Dieu renonce à châtier ce peuple. En reprenant les paroles du psaume, bien plus même en faisant nous-mêmes preuve d’humilité, nous disons notre foi en ce Dieu qui est capable de partir à la recherche de la brebis égarée en laissant seule les quatre-vingt-dix-neuf autres.
Quand nous errons dans le désert de nos existences, dans ces lieux arides, desséchés, dépourvus de tout repère – comme l’est le désert, nous savons que nous ne sommes pas livrés en pâture aux rapaces du ciel (comme le dit la Bible), nous avons cette ferme conviction qu’Il vient nous porter secours. Le moment des retrouvailles est moment de réjouissance et de « joie au ciel ». Moïse reste solidaire de son peuple ; il prie Dieu avec insistance de renoncer au mal qu’il avait voulu faire à son peuple. De même le Christ reste-t-il solidaire de l’humanité, en ne cessant de lui témoigner de la grandeur de son pardon.

II.- « Lave-moi tout entier de ma faute,
purifie-moi de mon offense ».

N’est-ce pas notre supplication, notre cri vers le Père afin que la « vérité nous rende libres » ? Prière entendue puisque Paul en témoigne : « Moi qui autrefois, dit-il, ne savait que blasphémer, persécuter, insulter. […]Le Christ m’a pardonné […]. La grâce de notre Seigneur a été encore plus forte ». Voilà l’œuvre de la conversion, d’un cœur résolument ouvert et disponible au pardon offert.
Vous en conviendrez : il n’est pas possible de prier ainsi, de demander d’être lavé de ses péchés, et de continuer comme si de rien n’était, comme si, la prochaine fois, nos serions de toute façon à nouveau pardonnés. L’amour du Seigneur est certes sans limites. Nous ne pouvons, cependant, penser que de faire une telle expérience de libération ne saurait ne pas nous transformer. L’Apôtre Paul a été saisi, au sens le plus fort du terme : « moi le premier, je suis pécheur, mais si le Christ m’a pardonné, c’est pour que je sois le premier en qui toute sa générosité se manifesterait ».

III.- « Crée en moi un cœur pur, ô mon Dieu,
renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit.
Ne me chasse pas loin de ta face,
ne me reprends pas ton esprit saint ».

Le cœur ainsi purifié et raffermi est en joie. Sans doute avons-nous tous déjà fait l’expérience d’un pardon authentique, un pardon qui coûte… Quand nous n’osons ni ne voulons, parce qu’ayant trop souffert, nous tourner vers l’autre pour lui pardonner, mais quand nous arrivons à nous dépasser et à poser ce geste prophétique de pardon, ou, quand nous-mêmes nous sommes pardonnés, nous ressentons une joie fantastique, merveilleuse. Certains parmi nous ont été témoins de la réconciliation entre des peuples qui se faisaient la guerre : cette réconciliation a passé par des pardons ; pour beaucoup, elle a été vécue dans la foi chrétienne et elle a façonné l’Europe.
Quand nous nous rendons capables d’avoir la même attitude de miséricorde que Dieu lui-même, il y a « beaucoup de joie au ciel », bien plus que pour les quatre-vingt-dix-neuf qui se croient justes et exempts de toute conversion. C’est encore le sens de ce verset du psaume : « le sacrifice qui plaît à Dieu, c’est un esprit brisé. Tu ne repousses pas, ô mon Dieu, un cœur brisé et broyé ». Dieu ne se plaît pas tant à nous voir brisés par nos péchés qu’à nous voir venir, revenir à lui pour trouver en lui la force de nous reconstruire. C’est en cette humilité, frères et sœurs, que réside le vrai sacrifice.

Maintenant, « Seigneur, ouvre mes lèvres » pour dire à tous la grandeur de ton amour et sa libéralité. Parce que j’en fais l’expérience et que tu me donnes, après avoir été perdu et après avoir chuté, d’être à nouveau un homme droit, « ma bouche publiera ta louange ».
« Quand on a goûté à l’agenouillement droit des hommes libres, les prosternements d’esclave ne vous disent plus rien ». Qu’il en soit ainsi !

AMEN.

Michel Steinmetz †

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