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samedi 30 octobre 2010

Homélie de la solennité de Tous les Saints - 1er novembre 2010

C’est un secret que nous venons d’entendre. Le secret de Jésus et de son Père. Les Béatitudes révèlent aux disciples pour qui bat le cœur de Jésus, pour qui vibrent les entrailles du Père. Jésus confie ce secret à ceux qui le suivent, mais à l’écart de la foule. Voilà qu’aujourd’hui l’Eglise nous le fait partager.
A nous, ici présents, comme à tous les catholiques du monde, aujourd’hui. A vous, que vous soyez de condition aisée ou modeste, à vous en pleine forme ou rongés de soucis, vous malades, chômeurs, vous, déprimés, endeuillés, solitaires…
Ne prenez pas ces mots pour de la poésie naïve ou de la provocation. Jésus n’est ni un poète en herbe ni un révolutionnaire anarchiste. Ces phrases, il les faut les murmurer avec beaucoup de discrétion et veiller à ne pas les déformer. Il faut les entendre dans leur fraîcheur, leur nouveauté toujours déconcertante, leur vigueur déroutante. Il faut aussi être disposé à accueillir la surprise d’une confidence.
Le pauvre, le doux, celui qui pleure sont heureux. Remarquez que Jésus ne dit pas d’eux qu’ils seront heureux, qu’ils le seront un jour, mais il dit qu’ils le sont déjà, maintenant. « Le Royaume est préparé pour eux depuis le début du monde » ; ils ont déjà commencé à en être les possesseurs. « Ils possèdent déjà le trésor céleste dans des vases d’argile, ils portent déjà Dieu dans leur corps et dans leur âme », dit le bienheureux Guéric d’Igny, un des disciples de Saint Bernard.

I.- Les Béatitudes vécues par le Christ lui-même.

Lorsqu’il confie ce secret aux disciples, Jésus enseigne en paroles et en actes. Il ne dit pas les Béatitudes : il les vit. Il est le pauvre, le méprisé, le doux et humble de cœur, l’artisan de paix…
Mais attention : Jésus ne souhaite ni la souffrance ni la pauvreté. Trop souvent, on a eu tendance à déformer ses paroles. Trop souvent aussi, par le passé, certains discours d’Eglise ont pu maladroitement le laisser supposer. Il faut souffrir pour gagner son ciel… Non, gagner le Royaume ne nous demande pas d’aller au devant de la souffrance. Pauvreté et souffrance sont des maux à combattre et nous savons qu’ils peuvent conduire aux pires folies.
Il suffit de souffrir un peu pour découvrir le vertige de se sentir abandonné de tous et celui du goût de vivre. Dans la souffrance, alors, précisément, on peut aussi trouver et garder un sens à la vie. C’est tout autre chose. Jésus l’a vécu dans sa Passion. Alors que tout lui crie qu’il est abandonné, il s’abandonne entre les mains du Père et se laisse porter par sa Parole : « Tu es mon enfant, aujourd’hui je t’engendre », je t’engendre à la vie, … je te ressuscite. Car le Père donne la vie même quand la mort semble, à notre vue humaine, l’emporter. C’est la foi de Jésus exprimée dans les Béatitudes : toute larme peut devenir pleur de joie, chant de résurrection. C’est le désir de Dieu offert à tout cœur désirant, sculpté par le manque, lavé par les larmes, patiné par la douceur et la miséricorde. Ce secret retourne le désespoir et offre la paix. On ne peut que le recevoir dans l’intimité et la confiance. C’est la foi.

II.- Les Béatitudes vécues par les saints.

La foi. C’est ce qu’ont vécu les saints. Les grands du calendrier, ceux que nous prions, et tous les anonymes qui vivent dans le cœur de Dieu. Saints de nos familles aussi, figures aimées et disparues qui peut-être à cette heure vous raccrochent à la vie. Ils ont goûté le secret de Jésus qui les a soutenus et ils vous l’ont fait pressentir. Ils ne vous oublient pas. Ils vous ont transmis la force de vivre et d’aimer qui vient de Dieu. Et si, dans l’épreuve, nous tenons, c’est que la Parole du Père nous tient !
C’est Georges Bernanos qui fait dire à son curé du roman « Sous le soleil de Satan » : « Quand on se lève pour maudire Dieu, c’est encore Dieu qui nous soutient ! »… Extraordinaire Dieu, capable de nous soutenir quand nous nous levons pour le maudire.
Alors, amis, en cette fête de la Toussaint, tellement proche du jour des morts qu’on les mélange sans cesse – à tort et à raison – en secret, en vous souvenant de vos chers disparus, de ceux qui ont été, pour vous, des lumières sur vos chemins de foi en Eglise, relisez le texte des Béatitudes avec délicatesse et tendresse. Prononcez-le chez vous à voix douce laissant peut-être les larmes couler, le pardon vous remuer ou la paix vous envahir. Heureux alors vous les doux, les artisans de miséricorde, les assoiffés de justice, le Royaume des cieux sera à votre portée… Laissez le visage de Jésus se mêler aux visages de vos morts. Mettez les paroles de Jésus sur leurs lèvres et laissez-les vous réconcilier.
Et puis, oui, faites-vous beaux, mettez vos habits de fête et allez au cimetière porter vos fleurs. Si vous n’avez pas de tombe où vous recueillir, allez devant la Croix qui s’y dresse, arbre de vie et de paix au milieu du jardin du repos. Et devant ce signe du secret de Jésus, le don de sa vie planté sur le nid de la mort, redites la parole de bonheur des Béatitudes qui vous parle le plus. Qu’elle vous conduise au cœur de Jésus pour mieux vivre. Cette parole de résurrection fera de la terre de mort et du souvenir une terre sainte que nul ne saurait profaner. Transfigurées sous le soleil de Dieu, vos fleurs seront signe et promesse de résurrection, faisant du cimetière le jardin fleuri du matin de Pâques.

Alors vous serez étonnés de voir les autres puiser à la source qui fertilise vos vies même dans la peine. Vous serez aussi sur le chemin de la sainteté. Pas d’héroïsme, pas d’extraordinaire mais de la résurrection : bonheur offert de vivre vivant et dans la paix, les choses faciles et difficiles. Avec Jésus, « doux et humble de cœur », mort et ressuscité.

AMEN.

Michel Steinmetz †

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