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jeudi 22 février 2007

Homélie du 4ème Dimanche du Temps Ordinaire (C)


« Seigneur, éloigne-toi de moi, car je suis un homme pécheur ». Lc 5, 9

Ce n’est sans doute pas la phrase qui retient notre attention dans ce passage d’évangile. Notre esprit s’attache plus volontiers à la parole de Jésus : « Désormais, ce sont des hommes que tu prendras », ou même à celle qui conclut ce que nous venons d’entendre : « Laissant tout, ils le suivirent ». Nous serions tentés de ne retenir qu’un appel pressant à l’action. Ce serait là mésestimer tout le reste. Si Jésus envoie ses disciples, s’ils les préparent à prendre eux-mêmes le relais de l’annonce de la Parole, il fonde leur action future sur l’expérience fondamentale d’une présence, de Sa présence.
Il faut avouer que cette scène évangélique marque les esprits à la mesure de la pêche de ce jour. Devant une telle manifestation de puissance, un homme, un disciple, Pierre, ne s’y trompe pas. Pêcheur lui-même, le signe donné là par Jésus lui parle plus qu’à quiconque. En fait, il lui est donné pour qu’ « il avance au large ».
« Seigneur, éloigne-toi de moi, car je suis un homme pécheur », c’est-à-dire : « Seigneur, je ne suis pas digne qu’un tel signe me soit donné, je ne suis pas digne de paraître devant toi ». La réaction de Pierre est bien humaine, n’est-ce pas ? Nous la partageons et nous ressentons ce même sentiment d’imperfection. Nous éprouvons le même besoin d’être purifié, mis en marche, pour témoigner à notre tour de la présence dont nous faisons l’expérience.

I.- Qui est digne de se tenir en présence de Dieu ?

La réaction de Pierre est légitime. Si nous sommes un temps soit peu honnête, nous n’avons aucune peine à la partager. A nous laisser saisir en profondeur par l’Ecriture, chaque verset, chaque mot nous bouleverse devant tant d’amour révélé. La vie même de Jésus nous appelle de manière pressante à la sainteté. Nous ne pouvons nous satisfaire de notre médiocrité, de nos manques, de notre péché. Franchement, si nous consentons à nous laisser rejoindre par la Parole de Dieu, si nous ouvrons notre cœur, nous ne pouvons rester insensibles. Pierre sait bien que face à la puissance de l’amour de Jésus, il est petit, vil, méprisable.
« Malheur à moi ! Je suis perdu, car je suis un homme aux lèvres impures, j’habite au milieu d’un peuple aux lèvres impures ; et mes yeux ont vu le Roi, le Seigneur de l’univers ! », s’exclame le prophète Isaïe. Il a conscience de l’incommensurable distance qui le sépare du Dieu trois fois saint qu’il contemple dans sa vision. Il en est comme tétanisé. Pierre ressent pareil « effroi », nous dit l’évangile.

II.- Il nous faut nous laisser purifier.

Comme le prophète Isaïe, Pierre appelle une purification qui le rendrait capable de se tenir là, en vérité, face à son Seigneur. Alors que, dans l’Ancien Testament, il n’était possible à nul homme de voir Dieu sans connaître la mort, Isaïe, avait été marqué aux lèvres par un charbon ardent, afin d’être purifié de ses fautes, d’être établi donc dans une dignité tout spéciale qui lui permettra de devenir le messager de l’expérience de proximité ainsi vécue. Pierre, quant à lui, n’aura pas besoin d’être marqué par le feu de la braise. Il n’aura qu’à se laisser consumer par l’amour d’un autre, celui de son Maître. Il n’aura qu’à se laisser prendre dans les filets qu’il a lui-même jetés dans le lac, filets de la Parole, filets de l’amour sans limite. Il lui est donné non seulement de voir Dieu mais de partager sa vie sur la route des hommes.
Cette purification d’un amour qui ne sera pas à sa mesure, qui ne sera pas le fruit de son effort, mais la libre acceptation de se savoir aimé, cette purification-là et cette expérience lui permettront de fortifier ses frères dans la foi. Elles lui donneront de devenir, par pure grâce, « pêcheur d’hommes ».

III.- Une nécessaire contemplation pour l’action.

Remarquez bien que Jésus n’envoie pas ses disciples sans s’être assuré au préalable de leur ressort intérieur. S’il les rassure – « sois sans crainte », dit-il à Pierre, c’est parce qu’il sait qu’ils ont fait en vérité l’expérience de la rencontre et de la présence. Dans le signe de cette pêche miraculeuse, ils n’ont pas vu que la puissance de Dieu à l’œuvre. Ils ont bénéficié de l’enseignement de Jésus : leur foi a été préparée, telle une terre, a recevoir ce grain fertile de la Parole. Ils ont vécu dans sa proximité, dans un compagnonnage de fait.
Leur action, si nécessaire soit-elle, n’aurait pu être féconde si elle n’avait pris d’abord racine dans la contemplation, c’est-à-dire dans cette attitude qui consiste à se délecter de la seule présence de Dieu. Comme un amoureux sent son cœur se dilater à la seule pensée de l’amour dont il est l’objet, celui qui trouve sa joie et sa paix dans l’intimité du Seigneur portera du fruit. C’est d’ailleurs la seule raison d’être et de vivre des séraphins dans le Temple : ils se tiennent en présence du Seigneur et se crient, sans cesse, l’un à l’autre, telle une bonne nouvelle qu’on ne finit pas d’annoncer : « Saint, saint, saint le Seigneur Dieu de l’univers ! Toute la terre est remplie de sa gloire ! ».

Le psalmiste a eu l’audace de chanter dans sa prière : « De tout mon cœur, Seigneur, je te rends grâce : tu as entendu les paroles de ma bouche. Je te chante en présence des anges ; vers ton Temple sacré, je me prosterne ». Puissions-nous avoir la même audace en ne demandant qu’une chose, tout en nous en donnant les moyens par une vie de prière authentique et quotidienne : avoir la même proximité avec le Seigneur que les séraphins au Temple ! Alors, avec Pierre, nous pourrons être sans crainte : nous témoignerons et nous prendrons les hommes et les femmes de notre temps dans les filets de l’amour de Dieu !


AMEN.

+ Michel Steinmetz.

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